mercredi 28 avril 2010

Vers des regroupements des lieux de musiques actuelles

Après la tentative d'"annexion" de l'activité musiques actuelles de la MJC de Cavaillon par la Scène nationale de la Ville, contrecarrée uniquement grâce à la mobilisation du secteur, le Monde annonçait dans son édition du 23 avril dernier le possible regroupement du centre de Châteauvallon et de la future scène de Musiques Actuelles de Toulon. Le comédien Charles Berling doit en effet  prendre les commandes du Théâtre de la Liberté qui ouvrira ses portes en septembre 2011. Or le futur directeur cherche un moyen pour obtenir un label de l'Etat, précisant ainsi que : "Pour que l'Etat s'engage, nous devons mutualiser les moyens avec les scènes locales - le centre de Châteauvallon et la future Scène de musiques actuelles à Toulon".
L'objectif est on ne peut plus clair : il ne s'agit pas de garantir une cohérence de projet à l'échelon territorial mais de trouver le moyen d'accéder aux financements de l'État.
La motivation était sans doute à placer sur le plan de la rationalisation de la gestion à Perpignan où le directeur de Elmediator annonce dans un communiqué la fusion de l'établissement qu'il dirige avec le Théâtre municipal (pour les musiques classiques) et le nouvel établissement culturel, le Théâtre de l'Archipel, qui ouvrira ses portes en septembre 2011 lui aussi, et dont la direction générale sera confiée à Doménac Reixach. Sur le plan de la "mutualisation", on pourrait sans doute aussi parler de l'innovant projet de SMAC à trois tête[1] dans l'Ardèche, qui permet à ces lieux du département, la Presqu'île à Annonay, Cavajazz à Viviers et l'Art scène à Payzac, de briguer une reconnaissance de l'État, de rechercher des complémentarités et de consolider leurs projets respectifs tout en respectant l'identité de chacun. Quatre situations dont la finalité peut sembler similaire, mais quatre situations particulières et surtout, des processus qui n'ont pas suivi les mêmes chemins. C'est là que le statut, ou plus exactement le mode de gestion prend toute son importance.
Car si la démarche adoptée à Perpignan n'a pas, semble-t-il, posé de problème, c'est que nous avons affaire à des projets de la municipalité qui, quels que soient leurs ancienneté, ont tous donné lieu à création d'établissements publics locaux. La ville est donc là dans son rôle, en imaginant des restructurations permettant les économies d'échelles, ou obligeant à une meilleure répartition des missions sur le territoire.
Dans l'Ardèche, (ou maintenant dans le Vaucluse où la même démarche est en cours), nous sommes face à une décision des acteurs de rechercher, par la coopération et la mise en commun d'objectifs, une meilleure reconnaissance de leur action, pour revendiquer les moyens pour la mise en œuvre de leurs missions de service public ainsi reconnues par les pouvoir publics.
Les deux autres démarches paraissent d'avantage relever de l'opportunisme. Ici pour s'extraire d'une situation périlleuse, là pour permettre une création d'activités, certains opérateurs, soutenus souvent (parfois téléguidés même) par leurs tutelles locales, n'hésitent pas à initier de larges regroupements sans la moindre concertation ni transparence, au mépris des projets des structures concernées. Pourtant, ces structures ne mènent leurs projets que grâce à l'opiniâtreté de leurs équipes, de leurs dirigeants, qu'ils soient bénévoles ou salariés, du public qu'on retrouve bien souvent impliqué dans la mise en œuvre de ces projets. Ce "capital" associatif parait ne pas peser bien lourd face aux logiques de rentabilité, aux recherches de performances et à la volonté de rationaliser la gestion de la culture. La concentration qui pourrait résulter aura sans doute un intérêt moins avouable, celui de réduite le nombre des interlocuteurs pour les décideurs politiques. Une seule tête, c'est moins de temps perdu à négocier et à argumenter avec chacun. Plus de structure à écarter et à qui il faut expliquer qu'on ne peut plus l'aider : on accorde des moyens (en baisse) à une structure qui se chargera, en interne, de la répartition de ces moyens entre ses différents activités ou sous-directions.
Une évolution loin d'être insignifiante du mode de gouvernance des activités culturelles et des relations entre le pouvoir politique et les acteurs, et entre les acteurs eux-même.

[1] Voir l'article du Dauphine
Le communiqué de presse d'Elmediator
Le Théâtre de l'Archipel, dessiné par Jean Nouvel, ouvrira ses portes en septembre 2011 composé du Grenat de 1100 places, du Carré de 550 places et d’un espace de répétition. Le Théâtre municipal (450 places) et elmediator dédié aux musiques actuelles (salle de 900 places et un club de 250 places) continueront à faire partie du dispositif.
L'équipe dirigeante est désormais en place. Domènec Reixach (ex directeur du Théâtre national de Catalogne) en a pris la direction, secondé par Jackie Surjus directrice adjointe déléguée aux musiques classiques et contemporaines et Maurice Lidou directeur adjoint délégué aux musiques actuelles et arts croisés numériques. Ainsi, les trois structures de spectacle vivant de la Ville, Théâtre, Campler, Elmédiator sont regroupées au sein du Théâtre de l'Archipel (établissement public local à caractère industriel et commercial).
La programmation 2010/2011 est déjà en cours d'élaboration dans le souci de respecter les identités propres de chaque département (théâtre/danse/cirque - musiques classiques/contemporaines - musiques actuelles/arts croisés numériques) et des festivals « Aujourd'hui Musiques », « Tilt » et «Musique Sacrée». De nombreuses passerelles entre les différentes disciplines sont mises en place tout en travaillant sur une dynamique transfrontalière et méditerranéenne. Le Théâtre de l'Archipel annoncera l'avant-programme de sa saison 2010/2011 en juin prochain. La programmation définitive sera publiée en septembre.
A partir de septembre 2010, c'est le Théâtre de l'Archipel qui communiquera sur l'intégralité de la programmation répartie sur trois lieux de la ville.
Domènec Reixach est catalan espagnol, il a été comédien, metteur en scène, puis directeur du centre dramatique de la Generalitat de Catalunya, avant de prendre la direction du Teatre nacional de Catalunya.
Maurice Lidou a participé à la création des Trans-Musicales de Rennes, à la création du FAIR, du Centre d’Information du Rock (et des variétés), dont il a été directeur, puis directeur de l’Agence des lieux musicaux et de spectacle avant de prendre la direction d’elmediator à Perpignan (scène de musiques actuelles puis scène conventionnée pour les arts croisés).
Jackie Surjus-Collet a fondé, aux côtés de Daniel Tosi, l’ensemble à cordes la Camerata de France ainsi que le festival de création sonore Aujourd’hui Musiques avant de prendre la direction de la structure de diffusion Centre Art Musique Perpignan Languedoc-Roussillon.

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